Depuis la route qui mène de Prostějov à Olomouc une construction toute en verre et alu, haute de 8 mètres, large de 200 mètres, cubique au possible, réfléchissant le ciel, nous intrigue. Elle semble gardée par des hauts silos des cuves inox et des orgues de refroidisseurs. Qu est-ce que c est que tout ce bastringue?

L'ensemble des serres, dont on ne devine pas encore l'étendue, est posé en surplomb sur un talus artificiel.


A notre troisième passage, nous ne résistons pas car ca miroite grave et cherchons le chemin qui y conduit. Nous sommes accueillis au pied du talus par une installation complémentaire et quelque peu masquée. Elle est construite majoritairement de béton, ca commence mal, le chantier ne semble pas terminé. On dirait une station d'épuration; portant les logos européens. La on se dit et pourquoi des subventions? Derrière la station qui se révèle être un complexe de méthanisation pour alimenter en énergie les serres, dégouline un tas de composte, pas joli joli. Plus loin un silo de plusieurs milliers de m3 de matières végétales est partiellement découvert pour alimenter en continu le digesteur, suposons nous. Combien d'énergie est nécessaire pour faire marcher cette production sous serre chauffee et eclairee?


Nous grimpons le talus et arrivons sur un parking où sont stationnés une grosse dizaine de voiture et plus loin le parking vélo compte 10 à 15 véhicules legers. On en deduit que les ouvriers n habitent pas loin. Des gars en salopette finissent de sécuriser le site en complétant les barbelées en haut de la clôture. Nous cherchons les bureaux et découvrons une salle à manger à l'arrière de la zone d'expédition. C'est là que nous sommes accueillis. Les lieux sont neufs, propres, lumineux, colorés: on se croirait dans un décor heureux de la marque suédoise. On nous souhaite la bienvenue et l on répond volontiers a nos questions. En cadeau on nous met dans les mains un beau panier de tomates cerises et un livret chic sur du papier cartonné communiquant en belles photos de tomates charnues et visages rayonnant d'une équipe heureuse de cultiver pour vous.

L'on nous informe que la visite des serres est interdite en raison du contrôle continu dans la lutte antibacteriologique... Les travailleurs passent par un sas pour se vêtir des vêtements réservés à la serre.

Des explications sur le fonctionnement nous sont données et nous nous laissons séduire par le caractère novateur, scientifique, clinique, systémique, abouti semble t il, organisé, productif et gigantesque, rangé, vertigineux et esthétique et aussi par le discours de caution gustative qui l'accompagne: "mes filles ne mangent plus de biscuits; elles préfèrent les tomates que je rapporte à la maison chaque jour." Raconte en souriant la dame, peut être agronome ou chargée de com.. A se demander si tout cela est spontané. Elle travaille ici depuis 6 mois. La ferme est toute nouvelle. Les premières tomates ont été plantées en décembre dernier. C est une des premières récoltes.


Quoiqu'il en soit nous sommes sous le charme. Nous apprenons que la serre couvre 2,5 hectares, que l'atmosphère est parfaitement contrôlée, en température, humidité pour le bien des plantes, que le taux d'oxygène est diminué que le taux de CO2 serait optimisé c'est à dire augmenté pour assurer la photosynthèse pendant le jour artificiel car les serres sont éclairėes. À se demander comment les employés peuvent y travailler? Les quantités d'eau consommées sont plus faibles qu'en conventionnel. On y contrôle à chaque instant la présence d'insectes nuisibles, ils sont englués sur des banderoles jaunes suspendues au dessus de la végétation et qui flottent comme des drapeaux de prière sous le ciel himalayen...

Pour contrer les éventuelles attaques indésirables on introduira les insectes auxiliaires adéquats. Probablement les auxiliaires sont-ils formés dans des séminaires ad hoc pour ne pas se laisser piéger sur les bandes jaunes comme des indésirables qu'ils ne sont pas.



Des échantillons de feuilles sont envoyés chaque semaine a un labo holandais pour les examens sanitaires: ce meme labo qui prepare les poches de substrat, celui qui a regle le systeme, celui qui recoit probablement des royalties. Grâce à ce contrôle pointue, on ne sourcille quasiment pas a l evocation des problemes lies a une monoculture sur 2,5ha.


Après cette visite éblouissante, une fois rentrés à la maison, nous viennent des questions plus sombres:

Que contiennent les poches de substrat hydroponiques? Les produits phytosanitaires sont-ils autorisés? Le personnel répond à côté, les poches contiennent les nutriments des plantes en proportion parfaite. Nous lisons dans la brochure de communication que les produits phytosanitaires sont minimisés au stricte nécessaire comparés à du conventionnel. Dans l'argumentaire on indique une économie de 20 ou 25%. Nous nous disons qu'une économie de 25% sur énormément de chimie ça reste encore beaucoup de produits. Nous pensons aussi aux besoins de la plante. N'a-t-elle besoin que des cinq ou six compléments qu'on lui offre? Quand bien même on ferait toutes les analyses et verserait-on dans le substrat aux petits oignons, la molécule qui lui ferait défaut, une plante n'est-elle pas à même de se soigner, se fortifier, s'équilibrer en bonne intelligence avec son milieu?


Et le goût dans tout ça? Nous dégustons les tomates cerises rouges ou jaunes. Elles sont très bonnes; sucrées, lègèrement acides, charnues, à peau fine. Comme ce sont nos premières tomates elles nous semblent excellentes, ... Si elles sont appétissantes aux yeux et au palais, sont-elles nourrissantes et vitaminées?

Pourquoi cette production n'est-elle pas bio? A la lecture du cahier des charges Bio européen nous apprennons dans les premieres pages que la culture hydroponique est proscrite en bio. Sur son site Ecocert ajoute que le lien au sol est une condition indispensable pour qu'une production soit biologique.

Nous apprennons que la production d'énergie par le digesteur voisin contribue au chauffage des serres la nuit et en période froide. Comment procède-t-on pour limiter la température dans la serre en periode estivale?

D'où proviennent les semences? OGM, sélectionnées, optimisées... On nous dit que les employés sont très surveillés pour éviter la dispersion des semences???


internet répond à certaines questions:

Des chercheurs du MIT (Institut de technologie américain) publient un article dans lequel ils expliquent comment ils ont créé une plante bionique. 14 juillet 2014 dans hydroponie.fr/plante-bionique/

Les chercheurs ont pour objectif d'améliorer les performance des plantes en implantant des nanotubes de carbone dans la structure du chloroplaste. On se rappelle que le chloroplaste a pour fonction de fabriquer du sucre et de la matière carbonée avec de la lumière, de l'air et un sol par la photosynthèse. Le but est d'augmenter son efficacité élargir à d'autre longueur d'onde du spectre lumineux la plage utilisée pour la photosynthèse... les premières expériences ont augmenté de 30% la photosynthèse... avec cette technologie ils estiment pouvoir également programmer des plantes pour séquestrer certains gaz toxiques...


Sur le site environnement-et-energie.fr/2015/07/les-carences-de-l-agriculture-hors-sol-hydroponique.html Sophie Le Gall journaliste fait analyser et comparer par un laboratoire des tomates hors sol et des tomates en pleine terre. Les résultats sont défavorables pour l'hydroponie: les taux de vitamine C et d'antioxydant -40%, le lycopene (nutriment) - 50%.


fermeful.com est une vitrine de l'expérience FUL (ferme urbaine lyonnaise). C'est un site faisant la part belle aux logos pour une communication accrocheuse avec l'emploi des termes tels que &optimisation automatisée et tri-dimensionnelle des espaces de culture& qui n'en disent pas si long. On évoque des rendements multipliés par 10!


Dans consoglobe on chiffre les 1000 m2 de ferme du type fermeful à 5millions d'euro, et les objectifs de production à 500 tonnes par an. Ce qui fait 5000tonnes/ha/an? Les bras m'en tombent quand je compare ce chiffre avec le rendement en 2013 en France de la betterave qui est de 97tonnes/ha ou du blé avec ses 8,1tonnes/ha (sur https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Rendement_agricole)

Dans cette configuration la densité des étages de culture et l'automatisation permettent de tirer le meilleur parti du foncier.


Sur un autre site on met l'accent sur la mise en pression de la serre pour contrôler mieux encore l'air et la présence des nuisibles...

Nous avons oublié de demander le prix de vente au consommateur. Je pense que nous allons y retourner pour pauffiner notre récolte d'informations.

Bref...quoiqu il en soit... les solutions existent... comme le disent les intervenants des cabarets philosophiques. ....https://www.youtube.com/watch?v=76RuIgEZXdc